vendredi, avril 28, 2006

Le but de l’Iran?


Je suis toujours fascines quand je lis les articles sur la situation de l’Iran et l’obsession – et non pas l’ambition – nucléaire de Ahmadinejad.

Considérons Le Figaro. Dans la Rubrique Opinions d’aujourd’hui on peut lire un article intitulé, « En divisant les grandes puissances, l’Iran est train d’atteindre son but. »  Quel est ce but ? Arme nucléaire ? Oui et non. L’auteur de l’article se concentre sur un autre aspect :

« La communauté internationale agit comme si elle s'était donné le mot pour décrédibiliser définitivement le régime de non-prolifération nucléaire. On se rappellera la crise en Corée du Nord et le retrait de celle-ci du traité de non-prolifération (TNP) en 2003, sans que le Conseil de sécurité des Nations unies ne bouge par crainte d'un veto chinois. Si la communauté internationale semble n'avoir tiré aucun enseignement de cette crise, la leçon n'a pas été perdue pour tout le monde. L'Iran prépare le terrain pour suivre le même chemin, au cas où le développement de son programme nucléaire serait menacé par le Conseil de sécurité. »

L’auteur ajoute que :

« En jouant sur les divisions des grandes puissances, sur la peur d'une envolée des prix du pétrole et sur la menace d'un soutien accru aux mouvements terroristes de la région, les dirigeants iraniens semblent avoir atteint leurs objectifs. Leur attitude délibérément provocatrice n'est sans doute qu'une étape de plus sur la voie de leur retrait du TNP, comme l'indique également la lettre (passée largement inaperçue) qu'ils adressaient à Kofi Annan le 21 mars 2006 dénonçant les menaces américaines de recourir à la force contre la République islamique – ce qui, souligne Téhéran, va à l'encontre des principes de la Charte des Nations unies.
 
Peut-être n'est-il pas trop tard pour sauver la crédibilité du régime de non-prolifération souscrit par cent quatre-vingt-huit pays et qui fut, jusqu'ici, un succès incontestable.”

De plus, il affirme que :

« Quant à l'Iran, ses dirigeants ont réussi avec brio à poursuivre sans répercussion négative la maîtrise technique de toutes les étapes du cycle du combustible nucléaire, dont le pays n'a aucun besoin au cours des dix prochaines années. Ce faisant, il compromet toute chance de progresser avec l'Union européenne vers la conclusion d'un large accord de coopération.”

Ce n’est pas une mauvaise interprétation mais – ce n’est pas une grande surprise – elle est bien Eurocentriste. Les Etats-Unis sont traités comme le grand méchant loup ; les Chinois et les Russes comme des alliés dont il faudrait se méfier, l’Iran comme l’enfant terrible, et l’Europe incarne la politique de la raison.

Je ne vais pas m’occuper de l’Eurocentrisme, précisément parce que ça voile les autres problèmes.

  • L’Iran n’a pas un but. La majorité des Iraniens – même les expats – y sont pour. Mais pour quoi ? Pour l’arme nucléaire ? Certes il y a des imbéciles qui suivraient ce chemin. Il n’y a aucune preuve que c’est une majorité, ou même une grande minorité. Pour l’utilisation pacifiste à long terme ? Iran en aura besoin à long terme. On ne peut pas tout baser sur le pétrole. C’est une réalité. Mais les gens ne deviennent pas surexcités à propos des plans à long terme. Mais c’est aussi un des buts. Il y a aussi le but de rassembler le pays derrière un symbole. Il y a le but de divertir l’attention des gens des problèmes du pays. Le pays est en crise et ces discussions aident le gouvernement à détourner l’attention des citoyens.

  • Il n’y a pas de politique unie en Iran. Non seulement il n’y a pas de but unique, il n’y a pas d politique unique non plus. Le gouvernement est fracturé et il y a de plus en plus de factions au sein du clergé. C’est pour ça que Ahmadinejad dit qu’il veut la bombe ; Khameneini dit que le but est pacifiste, que le ministre des affaires étrangères dit qu’ils ont déjà la bombe, etc.

  • Cherchent-t-ils à provoquer le Ouest ? En partie, oui. Est-ce pour le TNP ? Possible mais ça ne peut pas être le but principal. Est-ce par nationalisme ? En partie, oui. Est-ce par haine des Etats-Unis/Israël ? En partie, oui.

  • Mieux encore : est-ce que les Iraniens veulent la guerre ? Comme je l’ai dit, il n’y a pas d’unité politique en Iran. Il est vrai qu’une faction espère pouvoir provoquer des attaques aériennes. Ils savent que les Américains n’ont pas assez de troupes pour envahir le pays qui est trois fois plus grand en surface et en population que l’Irak. Au mieux, les Etats-Unis pourront les bombarder. Ca tuera des citoyens innocents ; ça enragera la population ; ça servira le pouvoir d’une cabale religieuse.

L’Iran, en ce moment, est tout ça à la fois. C’est un mélange de politiques intérieure, étrangère et folle.
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